Deux ans de thèse : le temps des havres et des cailloux

Il y a un an, je partageais ici ce qui m’avait marquée après ma première année de thèse : la liberté de gérer mon temps plutôt que de le subir et l’apprentissage par la lecture et l’écriture. L’effacement de la différence d’âge dans le travail partagé avec mes collègues et la richesse des rencontres avec les directrices et directeurs d’Ehpad. Aujourd’hui, je rejoue au jeu des quatre choses qui ont rythmé cette deuxième année.

Les bibliothèques, ces havres inattendus
Mes déplacements pour des communications ou des entretiens m’ont fait redécouvrir un lieu magique : les bibliothèques municipales. Je les connaissais comme des espaces familiaux, où l’on vient emprunter des livres ou s’allonger sur des coussins pour feuilleter des albums avec les enfants. Mais cette année, elles sont devenues bien plus : des refuges entre deux trains, des lieux d’observation où j’ai vu se croiser des âges, des origines, des histoires. Des lieux où la culture se vit, mais où une société se révèle.

Un sujet qui parle à tous
« Et votre recherche, elle est sur quoi ? » La question, posée entre deux bouchées ou deux étages, ouvre souvent une porte inattendue. Dès que j’ai répondu : « Les parcours de vie des directrices et directeurs d’Ehpad », les regards s’animent. Certaines personnes me parlent de leur parcours professionnel, avec fierté ou déception. D’autres partagent des anecdotes sur un parent entré en Ehpad, entre tendresse et nostalgie. Mon sujet traverse l’existence, devient universel.

Le déjà écrit, ou l’art de ne pas commencer
Je me suis fixé trois ans pour achever cette thèse. À l’approche de la rédaction, la montagne à gravir apparait soudain vertigineuse. Alors, depuis le début, j’ai pris l’habitude de glisser des cailloux dans mon panier : un texte de communication, une présentation destinée à mon groupe participatif, un billet de blog, des ébauches d’articles jamais terminés. En les rassemblant, j’ai découvert leur richesse : 150 pages où puiser. Le vertige n’existe plus. J’ai déjà commencé l’ascension de la montagne.

La thèse comme aventure collective
Les bibliothèques, les rencontres, les cailloux accumulés… Reste le groupe participatif de cette vingtaine de directrices et directeurs d’Ehpad qui m’accompagnent depuis trois ans. Grâce à elles, grâce à eux, la traversée n’est jamais solitaire. Leurs retours, leurs questions, leurs propres parcours ont nourri ma réflexion et donné sa raison d’être à chaque étape

Ce qui me frappe le plus, c’est alors ce paradoxe d’une aventure à la fois intime et collective. Solitaire dans l’effort, l’incertain et les doutes, mais portée par des voix, des regards, des histoires croisées.
Lieu magnifique : « Les Champs libres », à Rennes.