Edito pour les Cahiers pédagogiques, écrit en janvier 2017
La mise en place du Parcours professionnel carrières et rémunérations, le PPCR, amène à inventer une nouvelle forme de rencontres professionnelles entre les enseignants et les inspecteurs. En effet, lors des rendez-vous de carrière qui vont accompagner cette revalorisation, l’inspecteur ne va plus noter. Il va, dans un échange avec l’enseignant, revenir sur des compétences observables en classe et au-delà. Une chance de transformer des pratiques d’évaluation, une chance de se redonner une chance.
Sumballein, c’est jeter ensemble des tessons de céramique dont chacun prend un morceau, le sumbolon, qui a donné le symbole. Quand on les réunit, on obtient des sumbola qui concordent et prouvent qu’on est bien dans le cadre d’un contrat puisque les parties s’accordent. Le PPCR apparait comme une occasion pour que les enseignants et les inspecteurs tendent les uns vers les autres leurs fragments de terre cuite, les signes d’une alliance symbolique et tacite qu’ils avaient déjà passée autour de l’école. Cette alliance symbolique, ils l’ont peut-être parfois oubliée. Est-ce la faute du temps qui érode le pourquoi des choses, de la coutume qui affadit le regard, des postures qui font taire la parole vraie ? On peut se dire que les métiers de l’inspection, et l’inspection elle-même, avaient déjà changé, beaucoup moins dans le contrôle et davantage dans l’accompagnement, mais que les représentations sont toujours plus lentes à évoluer que la réalité, et que parfois même la réalité restait empêtrée dans des Epinal jaunies et des modèles qui ne devraient plus avoir cours. Le PPCR et la nouvelle forme des rendez-vous qu’ils vont se donner sont des occasions pour qu’enseignants et inspecteurs voient alors à nouveau ce qu’ils partagent, leur travail basé sur un engagement fort, et qu’ils voient à nouveau ce qui les réunit, les destinées d’élèves. C’est une opportunité pour chacune des parties de s’asseoir ensemble et de faire le point sur l’aujourd’hui, de préparer les lendemains partagés. Et de refaire alliance.
Une alliance, cela se joue autour de mots et se noue dans un pacte. On pourra refaire alliance en mettant en mots, ensemble, les pourquoi et les comment d’un rendez-vous de carrière. Qu’est-ce qui demandera d’être observé par l’un pour évaluer les compétences de l’autre ? Comment partagera-t-on ensuite le vu, le su et le vécu ? Et au-delà du vu et du vécu de l’enseignement et des apprentissages, qu’est-ce que chacun attend de ce moment ? L’occasion est donc donnée de construire ensemble ce qui pourrait rendre visible cette alliance, et peut-être prendre la forme d’une charte déontologique de l’inspection1, à partir d’une réflexion sur les postures de chacun : lorsque l’on est assis dans une organisation hiérarchisée, quels traits d’éthique personnelle protègent l’autre et la relation ? Comment se retrouver face à face, égaux, adultes et autonomes ?
Oui, le PPCR porte avec lui le possible d’une nouvelle alliance symbolique, pour que les rendez-vous de carrière soient des espoirs de rencontres dont on peut ressortir un peu meilleurs, un peu plus légers, envoyés avec optimisme sur son chemin d’éducation. A nous tous de l’inventer.
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